Chaque étudiant.e avait pour consigne d'écrire, en une heure, un texte sensible pour expliciter son programme d'un point de vue qualitatif. La forme du texte était libre.
Ces textes ont aussi été lu lors de notre rencontre avec le Phun, lors de la séance 4.
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Présentation des planches et lecture des textes, à l'équipe du Phun |
De
la cartouche à la carotte (Krystel)
Nous
sommes un samedi matin de juillet, le soleil surchauffe dans mon
logement au centre-ville de Toulouse. Je quitte alors en tram pour
aller rejoindre ma cousine et ses enfants dans le nouveau quartier de
la Cartoucherie. J’ai beaucoup entendu parler de ce quartier de
grande envergure dit écolo. Nous avons prévu passer la journée à
l’extérieur et profiter du soleil.
Arrivée
chez ma cousine, Elizabeth me propose aussitôt de profiter de
l’espace vert qu’elle dispose avec ces voisins au cœur de l’îlot
où qu’elle habite. Les enfants me proposent d’aller arroser les
plantes en bas. Ils m’expliquent qu’ils font pousser quelques
légumes et qu’ils les utilisent pour faire la cuisine avec leur
maman. En arrivant au niveau du sol, j’aperçois une structure
originale et invitante remplie de verdure. Tout en travaillant dans
cette serre avec les enfants je croise la voisine de Elizabeth qui
vient elle aussi arroser ses récoltes. Josée m’explique alors que
le nom du quartier vient du fait qu’anciennement le site était
occupé par une grande cartoucherie. Par la suite, il a été occupé
par GIAT puis par les bus de Tisséo. Elle me raconte qu’initialement
le projet du quartier était prévu pour 2014-2015. Les retards ont
été nombreux et notamment causés par la dépollution chimique et
pyrotechnique de certains sites industriels du quartier. Les diverses
tentatives de dépollutions ont retardé le projet si loin que la
première pierre n’a été posée que le 26 septembre 2014. Encore
aujourd’hui, certaines zones du site restent polluées puisque le
quartier a été construit sur des résidus de munitions, dont le
plomb, le mercure et l’arsenic.
C’est
alors qu’un autre voisin d'Elizabeth se joint à la conversation.
Il revient d’une balade dans le quartier passant près de la serre
où nous nous trouvons. Jacques aborde le fait que la dépollution
n’existe pas et qu’aujourd’hui, on gratte un peu la terre, on
met une nappe géotextile et on remet 30 à 50 cm de terre propre
par-dessus. Selon lui, la pollution reste. Il explique que dans
certains écoquartiers, l’Agence régionale de santé (ARS)
interdit aux habitants de planter des fruits des légumes
consommables dans leurs jardins.
C’est
alors que je fis le lien avec la serre et les jardins verticaux où
je me trouve actuellement. Durant cet après-midi je ressens la
chaleur du soleil, mais aussi la fraîcheur qu’apporte la
végétation dans cet îlot. La fin de la journée approche, je
quitte alors ma cousine et ses enfants pour retourner à Toulouse.
Sur
le chemin du retour, je me questionne sur ce quartier. Est-il
vraiment écologique puisqu’il est construit sur des poubelles
industrielles ? C'est un paradoxe qui a de quoi m’étonner.
Heureusement, l’implantation de serre et de jardins verticaux
partagés sert à pallier ce risque de terre insalubre. Si Josée ne
m’avait pas expliqué tout ça, j’aurais simplement pensé que
c’était une façon originale de faire de l’agriculture tout en
passant du temps avec ses voisins.
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Article de la Dépêche
du Midi, août 2040 (Thibaud)
À
l’occasion du vingtième anniversaire de
l’inauguration du complexe sportif du quartier de la Cartoucherie à
Toulouse, Julien Majorel, aujourd’hui triple champion de NBA avec
les Golden States Warriors de San Francisco revient sur ses premiers
paniers au pied de son immeuble.
«
Je m’en souviens comme si c’était hier ! On était impatient que
les travaux se terminent pour pouvoir jouer avec les potes ! Au
début, on a tout essayé se rappelle-t-il, ping-pong, volley,
escalade, football, tennis, basket, skateboard… On a même fait
plusieurs tentatives à la pétanque mais c’était plutôt pour les
vieux, dit-il en souriant. Nos parents ne voulaient pas qu’on reste
enfermé à la maison devant la télé, alors on prenait un ballon et
on allait jouer tous ensemble après l’école, le week-end et
surtout pendant les vacances !
Plus
tard on jouait plus forcément parce qu’on avait passé l’âge,
on discutait de tout et de rien, chacun avait pris un chemin
différent mais nos parents eux étaient restés là, alors on se
rassemblaient chaque année pour les fêtes de Noël, on en a bu des
verres au bar des Halles...
Ce
complexe a permis à de nombreux jeunes de s’épanouir ! Et ce qui
est extraordinaire dans cette histoire, c’est que le projet est à
l’initiative des habitants, c’est eux qui ont bataillé pour
l’obtenir ! Et par la suite, lorsqu’on s’est rendu compte qu’il
fallait l’améliorer, y rajouter un point d’eau et de l’éclairage
pour le soir, se sont eux. Et l’idée de le repeindre entièrement
avec l’aide d’un collectif d’artiste pour l’anniversaire
cette semaine, c’est encore eux aussi ! Il donne vie au quartier
depuis toutes ces années et du coup tout le monde en prend soin !
C’est
grâce à eux si j’en suis là, ils sont nombreux à m’avoir
soutenu dès le début, lors de mes sessions de shoot nocturnes
lorsque j’ai voulu intégrer le pôle France ou encore ma
préparation physique avant de partir aux États-Unis. Ils sont tous
très fiers de moi, mais je le suis encore plus d’eux !
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Deux
« voisins » à réconcilier (Adrien)
Arrivée
à la Cartoucherie. Comme la dernière fois, j’essaye d’arpenter
l’espace librement et sans à priori. Histoire de voir où cela me
mène. Je l’avoue, je préfère jouer à l’explorateur plutôt
qu’au cartographe.
Et
comme la dernière fois, je ne peux pas m’empêcher de focaliser
sur les espaces en chantier et les friches actuellement laissées
dans l’attente.
J’ai
une relation assez particulière au chantier puisque j’ai travaillé
dans un d’entre eux en tant que conducteur de travaux. Entre nous,
ce n’est pas la phase que je préfère dans un projet.
Mais
alors, pourquoi est-ce que celui-là m’attire tant ? J’ai du
mal à comprendre.
Je
me réalise qu’ici, plus qu’ailleurs encore, il y a une
cohabitation très forte entre l’existant, le « en-cours »,
et le « à-venir ». Cette cohabitation se cristallise
autour des interfaces entre le quartier neuf et le chantier.
La
présence de tels espaces vient « gêner » l’existant,
qui à son tour aimerait se débarrasser de ces zones parasites, mais
néanmoins nécessaires dans la constitution du quartier futur.
D’un
côté de la frontière, une entité recherche le calme, la propreté,
une notion particulière de la « sécurité » et essaye
de se constituer une vie, des échanges.
De
l’autre, ça cogne, ça crie, ça fait de la poussière. Personne
de doit rentrer et ce n’est pas forcément très joli. On se cache
d’ailleurs derrière des barrières ou au contraire tout est laissé
tel quel en spectacle.
En
tout cas, la frontière entre les deux est forte. Mais est-elle
irréconciliable ? Je ne pense pas.
Dans
mon objectif de rabibocher le chantier avec l’existant mais aussi
un peu avec moi-même, quelques questions se sont imposées à mon
esprit :
Comment
créer une interface « satisfaisante » entre travaux et
existant ?
Comment
préfigurer l’à venir, assurer une transition et générer une
relation qualitative dans ce quartier en travaux ?
Après
les questions arrive un début de réponse. Quelque part dans le
parc, sous la forme précaire d’Algecos entassés ci et là, la
présence de l’école maternelle sur le site de la Cartoucherie est
déjà effective. Le temps de la construction de la « vraie »
école, il y a déjà la volonté de « préfigurer »
l’avenir. Ainsi, la vie s’organise autour du chantier, jusqu’à
prendre la forme d’un chantier elle-même.
Cette
observation déclenche dans ma tête une petite étincelle.
L’objectif
de mon programme architectural serait de mettre en œuvre un
aménagement provisoire démontable ayant la capacité de suivre le
chantier dans son long coulissage vers l’est. Positionné à
l’interface du chantier et de l’existant, il aura pour
mission de:
Remettre
en cause la nature des interfaces actuelles entre le chantier et
l’existant.
Limiter
les nuisances (bruit, poussière, etc.)
Inciter
à la préfiguration de « l’après », et même à sa
prise en main, peut-être par la médiation.
Eveiller
l’esprit du quartier.
Développer
la présence culturelle et la transformation d’un espace urbain en
espace public, voire commun.
Cet
aménagement, considéré dans un premier temps dans le cadre d’une
situation universelle plutôt qu’implanté dans un contexte spatial
particulier, viendrait néanmoins s’incarner dans certains lieux de
la Cartoucherie, à des interfaces chantier/existant de différentes
natures, que ce soit dans leurs situations spatiales mais aussi
temporelles.
Il
aurait ainsi pour vocation de constituer un tiers-acteur, ou un
«troisième habitant» accompagnant le quartier dans son évolution.
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(Macarena)
Je
suis chez moi. Un monde qui s’habille en vert accueil ma maison. Un
espace qui respecte l’être humain, offre toutes ses qualités pour
y vivre avec bonheur. On dirait un canal connecteur du minéral et du
végétal. Cet espace est vivant, je respire un air frais
provenant
du grand parc Barry. J’ai envie. Je regarde au loin et je marche,
mais les
traces
lointaines se perdent d’une manière mystérieuse. Je veux
découvrir.
Des
fous de rire s’entendent depuis l’aire de jeux, dont d’ailleurs
même les adultes
profitent.
Plus
loin, les gens de l’administration de l’école profitent de la
pause pour prendre quelques rayons de soleil sur les decks en bois,
lesquelles flottaient sur l’eau à cause les grandes pluies de la
semaine dernière. Le son de la guitare accompagne les
activités
variées autour de ce scénario partagé.
D’un
côté, mes pieds qui suivent la texture rugueuse du sol, d’autre
part, mon regard qui
traverse
le vide entre les deux lignes des bâtiments, jusqu’à s’arrêter
dans la grande
halle,
magnifique patrimoine qui se démarque par rapport aux autres.
Je
continue le chemin, les ambiances changent avec mon humeur, le soleil
apparait et
disparait,
les couleurs passent de rouge à jaune, et la topographie m’oblige
à monter et
à
descendre. L’odeur des crêpes attire la femme qui passe en face.
Les bruits apparaissent, c’est mieux si je suis encore plus loin.
Je
m’assois, je me sens en intimité,
C’est
le moment de tourner la page.
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Anne (Laurie)
Anne
sort du tram et pousse un soupir. Elle regarde sa montre : 18h15.
Elle a eu une journée de travail chargée et un client de dernière
minute l'a retenue au boulot plus tard qu'à l'habitude.
Heureusement, le retour à la maison n'est jamais bien long ni
compliqué ; elle peut aussi bien prendre le bus que le tram. Elle
emboîte le pas vers la boucherie qui donne sur l'avenue
Grande-Bretagne à une trentaine de mètres plus loin pour y acheter
le nécessaire pour le dîner. Elle apprécie grandement que le
quartier de la Cartoucherie, où elle a déménagé 2 ans plus tôt,
offre cette variété de petits commerces lui permettant de faire les
courses quand bon lui semble étant donné leur proximité.
De
retour à l'extérieur, elle emprunte un étroit passage menant au
cœur de l'îlot. Pour se détendre après cette grosse journée,
elle déambule tranquillement entre les jardins tout en se laissant
réchauffer par les rayons de soleil qui percent entre les feuilles
des arbres. Anne sourit : Elle trouve toujours aussi agréable
d'emprunter cette jolie promenade enveloppée par la végétation et
sur laquelle donne les balcons privés des logements. Une fois
arrivée de l'autre côté de l’ilot, elle traverse la rue puis
suit le cheminement qui pénètre dans la seconde cour centrale. Deux
fillettes s'amusant ensemble la saluent gentiment. Bien que chacune
des cours aient un caractère distinct, elle les trouve toutes aussi
sympathiques et accueillantes. Elle s'y sent déjà un peu chez
elle.
Arrivée
à la promenade des sports, elle remarque un petit café de l’autre
côté du ravin qui semble nouvellement ouvert. Curieuse, elle s’y
rend et se laisse tenter par un des multiples smoothies proposés
qu’elle prend pour emporter. Sur le chemin du retour, elle salue
Françoise, sa voisine, qui court avec son chien en direction du
parc. Anne rentre chez elle le sourire aux lèvres : cette
courte balade lui avait fait retrouver sa bonne humeur !
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Paul
(Jessica)
Paul
se lève le matin, un peu fatigué. C’est un lundi matin
ensoleillé. Il doit vite se préparer pour aller travailler.
Il
sort de son appartement, descend les marches des escaliers et abouti
dans la cour intérieure de l’îlot complètement ouvert et
végétalisé, cette dernière se prolongeant vers la Promenade des
sports, le noyau du quartier de la Cartoucherie.
Paul
se dirige vers l’un des nombreux marchés du rez-de- chaussée
situés juste en-dessous de son appartement, pour aller y chercher
son déjeuner pour le midi. Il connaît bien François, le
propriétaire de la boulangerie. Il lui a même fait goûté une
nouvelle pâtisserie qu’il a cuisinée ce matin-même !
En
sortant, soudainement, Paul semble entendre quelqu’un l’appeler
au loin. C’est Gilbert qui sirote un thé sur la terrasse du café
situé de l’autre côté de la place publique ! Paul traverse la
Promenade des sports, là où quelques étudiants se sont installés
pour finir leur petit-déjeuner et parler des potins du moment.
Il
rejoint Paul sur la terrasse, qui l’invite aussitôt à venir
prendre un petit café avec lui. Et pourquoi pas ? Les deux amis
finissent par discuter de la température, de ce qui se passe au
boulot et les évènements qui se tiendront le soir même sur cette
petite place publique. On dirait bien qu’une course à relais,
organisée par le centre des jeunes, sera prévu pour les enfants du
quartier. Paul se dit que ça serait drôle d’aller voir ça.
Peut-être qu’il convaincra Marine, sa conjointe, d’y aller avec
lui.
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Le
programme sort de la bouche des enfants (Péroline)
Toulouse,
nouveau quartier de la Cartoucherie. Mois d'avril, des jeunes pousses
vertes naissent sur les branches, le temps est nuageux, mais parfois
des rayons de soleil arrivent jusque terre.
Fin
d'après midi, les gens vaquent, finissent les cours ou sortent du
travail, vont faire des courses, rentrent chez eux ou vont au cinéma.
Parmi eux, un papa est allé chercher son fils à l'école
maternelle. L'enfant est curieux, il veux aller au parc à côté de
l'école, la maitresse en a parlé dans la journée. Le père,
patient, accepte, à condition de s'y rendre à pied. Sur le trajet,
l'enfant tire la main de son père pour l'arrêter.
-
« Qu'est ce qu'il y a Matéo ? » s'étonne le père.
-
« Papa, c'est quoi cet endroit ? »
-
« Qu'est ce que tu veux dire ? »
-
« Ba … Depuis qu'on marche, il y a plein de grands immeubles, et
puis d'un coup il y en a plus. »
-
« On arrive à la fin du quartier où il y a ton école et là on
arrive presque au parc. » explique le père
-
« Ah d'accord … Mais il est où le parc ? »
-
« Et bien tu vois, il y a cette place où on est, la route qui passe
juste derrière, et encore après, c'est le parc. Tu comprend ? »
-
« Oui, c'est plus clair maintenant. C'est à cause de cette route
que j'avais pas compris ! On voit que
ça
! Pourquoi elle est là ? » demande l'enfant.
-
« Il faut bien que les voitures puissent faire le tour du quartier
Matéo. » répond calmement le père.
-
« Et bien je trouve que c'est nul ! On peut pas aller directement
dans le parc, on est obligés de faire
attention
aux voitures ! C'est dangereux en plus, c'est toi qui me l'a dit ! »
s'agace Matéo
-
« C'est vrai, j'ai dit ça. Et c'est vrai qu'il faut faire
attention. Mais regarde, il y a quand même cette place avant
d'arriver à la route, tu en penses quoi ? »
-
« Mmmh … Je trouve que c'est joli. Mais c'est bizarre, il y a
encore une route qui passe au milieu !
On
devrait la cacher avec un espèce de tunnel, ça serait rigolo ! »
-
« Tu as raison, en plus ça permettrait de faire une seule grande
place au lieu de deux petites. »
complète
le père.
-
« Mais oui ! T'as trop raison papa ! Et il y a un autre truc qui est
bizarre, t'as vu, il y a quelqu'un qui a mis une barrière autour de
l'herbe … Du coup, on peut pas y aller, c'est bête. »
-
« C'est pour protéger les fleurs, et aussi pour pas salir. »
explique le père.
-
« Oui mais ça serait bien si on pouvait aller y jouer ! Il suffit
de faire attention aux fleurs ! Et puis on peut pas passer comme on
veut ! On pourrait faire un chemin qui traverse, avec du bois par
terre, tu sais comme à la maison ! »
-
« Comme la terrasse tu veux dire ? En plus petit ? » demande le
père.
-
« Oui c'est ça ! » s'exclame l'enfant. « Et regarde là, c'est
bizarre, il y a des barreaux aux fenêtres. C'est une prison ? »
-
« Ahah non, ce sont des bureaux où il y a des gens qui travaillent.
Tu trouve que ça à l'air d'une
prison
? »
-
« Je sais pas, un peu. Mais de dehors, ça fait pas très sympa. De
notre côte, on pourrait faire
pousser
des plantes, ou faire des dessins, ça serait quand même plus joli …
On pourrait même faire
des
minis cabanes ! » s'enthousiasme l'enfant.
-
« Ma foi, oui c'est une idée. » s'amuse le père devant
l'excitation de son fils.
-
« Et t'as vu papa, là bas il y a des gens qui attendent devant
l'immeuble ! Ils attendent quoi ? »
continue
l'enfant.
-
« Cet immeuble, c'est en fait une école pour devenir infirmière. »
précise le père. « Et tu vois, ils ont fini l'école, comme toi,
et là ils discutent avant de rentrer chez eux. »
-
« Mais pourquoi ils restent plantés là ? Ils ont pas vu qu'il y a
des bancs ? »
-
« Ah oui, tiens. Pourquoi, à ton avis ? » questionne le père.
-
« Euh … Le bancs sont trop loin peut être ? C'est vrai qu'il y a
rien devant cette école, c'est nul. Ça
serait
mieux si on mettait quelque chose pour que les gens se sentent plus
accueillis quand ils arrivent, ou que ce soit plus agréable quand on
y passe ou quand on sort … Tu vois, devant mon
école
il y a des poteaux de toutes les couleurs ! Et puis ça permettrait
de comprendre que c'est une
école
! Parce que là j'avais pas compris. » développe l'enfant.
-
« Encore d'autres idées ! Je vais finir par les noter apprenti
architecte ! » rigole le père.
-
« C'est quoi un architecte ? » demande alors l'enfant.
-
« Pour faire simple, c'est une personne qui réfléchit à comment
on fait une maison, ou un immeuble, ou même une place comme
l'endroit où on est en ce moment. »
-
« D'accord ! Il a quand même des drôles d'idées, cet architecte.
Parce que comme ça, c'est tout joli,
tout
propre, mais t'es sûr qu'il a vraiment pensé aux gens dans tout ça
? »
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Liaisons
perméables
Jade
(Léa)
La Promenade des sports est animée, habitée et accueillante. Au
centre, les jardins en creux et immersibles créent un véritable
îlot de fraicheur au cœur du quartier. Les petites boutiques se
sont installées au fil des années aux abords de la place publique.
Elle connecte avec la promenade jardinée aménagée d’une balade
cyclable et piétonne.
C’est
l’endroit préféré de Jade, une grande écologique qui a toujours
voulue résider dans un écoquartier. Elle y passe beaucoup trop de
temps. En fait, elle se méprend souvent à y observer la vie qui
prend place autour d’elle. Le va-et-vient, les rencontres, la
détente, l’attente, les cheminements, les balades. Elle en oublie
même qu’autrefois ce lieu était froid et délaissé. Elle se perd
alors dans ses pensées. Les rayons réchauffent sa peau, les rires
d’enfants résonnent à ses oreilles et l’odeur du pain
fraichement cuit enveloppe le lieu.
C’est
une belle journée se dit-elle.
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La
promenade des « arts » (Ginette)
Je
me promenais dans cette vallée verte en plein cœur de la ville.
La
flore du parc de Barry semblait s’être infiltrée au milieu de ces
immeubles de béton, de ces bureaux, par cette artère qui conduisait
la nature à travers la ville depuis le cœur vert qu’est le parc.
Cette
promenade était toujours animée.
Des
enfants de l’école y jouaient pendant leur récré. Certains de
leurs cours de théâtre, de musique, de danse s’y déroulaient
également, certains parents , quand ils étaient du quartier,
venaient y assister .
Des
jeunes de l’école de la santé et du quartier s’y réunissaient
pour travailler, discuter, ou tout simplement prendre leur déjeuner.
C’était
également l’espace préféré de pause des employés de bureau.
En
début de soirée, quand le temps le permettait, c’était la scène
à ciel ouvert des petits groupes locaux qui s’y représentaient
devant un public assis entre les plantes.
Un
public fait de passants curieux, d’employés qui en allant regagner
leur voiture au parking avaient fait une halte mais surtout de
résidents, qui en chemin vers leur logement, s’étaient arrêtés
pour assister mais aussi retrouver leur voisins.
Les
week-ends, on y chantait, on dansait, on slammait, on tenait des
réunions, des débats... devant un public plus ou moins attentif,
mais qui appréciait toujours ces animations autour desquelles tout
le quartier se retrouvait.
Lors
de la fête de la musique, on retrouvait tous les petits groupes qui,
avec le temps, s’étaient formés dans le quartier et avait trouvé
au sein de ce dernier leurs premiers spectateurs.
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VI(LL)E (Rosemarie)
La ville programmée peut elle
être vivante ? Est ce que la vie se planifie ?
À
Toulouse, un l’éco-quartier de la Cartoucherie se construit peu à
peu en suivant scrupuleusement le plan directeur établit. Ce plan
prévoit précisément les emplacements des commerces, des activités,
des logements… Tout est planifié à l’avance. Il n’y a aucune
place laissée à l’imprévu, pas de possibilité d’accident. Ce
quartier va devoir s’animer dans un carcan qui n’a pas laissé le
temps à la vie de naître, à l’esprit du lieu d’émerger.
Avons-nous oublié la spontanéité ? Ne sommes-nous pas en train de
priver le citadin d’un pouvoir d’action sur son environnement ?
De déposséder la ville de sa part de sensible, de sa capacité à
nous troubler, nous émouvoir, nous dérouter ?
Aujourd’hui, les grandes
émotions collectives n’ont plus lieu que lors d’attentas ou de
matchs de foot. Pourtant, la ville peut être support d’évènements
heureux, de joies du quotidien. Il est essentiel et urgent, pour le
futur de ce quartier, de ré-injecter de l’émotion à petite
échelle, de la vie, du vivre. De penser à recréer de la surprise,
car la surprise produit l’émotion et l’émotion vécue à
plusieurs crée du lien social et donc du vivre ensemble. La ville
homogène ne correspond pas à la diversité, la pluralité de
l’expérience de l’homme, la ville nécessite d’avoir en son
sein des singularités et de l’aléatoire pour exister et perdurer,
pour devenir un environnement sain dans lequel évoluer.
LES
POSSIBLES
Seulement une petite partie des
futurs bâtiments de La Cartoucherie est aujourd’hui achevée.
Lorsqu’on s’y promène, ils est difficile de se projeter au
milieu des travaux, au pied d’un immeuble neuf, les chaussures dans
une flaque de boue. Il faut faire un effort impressionnant pour
imaginer les enfants jouer au coeur de l’ilot, entendre leur rire,
voir un couple se promener sur la sente au loin ou encore un groupe
d’étudiants installé sur les bancs de la place. Lors de ce
travail de projection on a encore du mal à se figurer autre chose
que des rues aseptisées, toutes plus ou moins semblables au milieu
d’immeubles lisses tous plus ou moins différents.
Maintenant que ce quartier de
Toulouse à été valorisé par tous ces nouveaux bâtis et
aménagements, ne faudrait-il pas penser à le vitaliser ? À
tenir compte du fait que la vie dans un lieu vient des gens, du
quotidien, des dynamiques socio-culturelles et pas uniquement de
l’aménagement.
Mais comment laisser place à
cette part de singularité et d’aléatoire qui ne peut être
planifiée ?
L’intention est claire :
faire des interventions subtiles, disséminées dans le quartier, qui
se jouent des usagers en s’amusant par exemple avec les évènements
climatiques, les dispositifs d’éclairages, les usages, les
ambiances en général finalement.
L’idée de départ est
d’utiliser les petites halles, vestiges du passé du site comme
lieu employé et géré par et pour les habitants (du quartier en
premier lieu, et de Toulouse par extension). Ce serait un espace
public, ouvert, pouvant plus ou moins se moduler en fonction des
besoins et des envies. Il serait l’épicentre, le point de départ,
support de tous les évènements poétiques que nous réintroduirons
dans ce jeune quartier.
L’autre est d’abandonner
certains lieux aux habitants : on peut ainsi imaginer qu’un
repas des voisins a lieu chaque mois dans l’un des coeur d’ilot,
que l’esplanade des sports devient un lieu de construction de
cabanes pour les enfants, qu’un karaoké est organisé sur la place
tout les dimanches, qu’un potager mutualisé pousse au coeur de la
promenade jardinée…
Ces actions
permettant l’appropriation sont un exemple de tous les possibles
existants pour donner vie à un lieu. C’est aussi une manière
douce et peu coûteuse de lutter contre la délinquance tout en
impliquant chaque usager dans une forme de respect et d’attention
données au lieu. Enfin, il est évident que ces petites étincelles
de vie sont en premier lieu support d’échanges et de rencontres.